La vie et la carrière de Michel Petrucciani forcent tous les hommages. Cependant, les qualités de brio et de profondeur de sa musique si singulière ne rendent pas la chose facile. Je dois dire que la sincérité n’y suffit pas et qu’il aura fallu l’expertise de Franck Avitabile pour me convaincre pleinement.
Michel m’avait demandé de représenter ce très jeune pianiste alors qu’il allait produire son second album, le premier pour Dreyfus Jazz. J’avais rencontré un garçon charmant, enthousiaste, un peu lunaire. Egalement mathématicien chevronné, il avait quelque chose du professeur Tournesol et, au piano, la conviction indifférente du Linus de Schulz qu’on voit résister au bavardage incessant de Lucy dans l’univers faussement naïf de Charlie Brown.
Le jeune pianiste prodige est devenu un musicien accompli, sur de ses choix, qui maîtrise son instrument et son discours. Mieux encore, il s’est montré capable d’aborder avec une puissance éclairée la thématique musicale piégeuse, plus savante qu’il n’y paraît, de cet autre prodige, exercice dans lequel bien des apprentis sorciers se sont perdus en redites fastidieuses.
Pour cela, il a su s’entourer à merveille et diriger ses musiciens sans complaisance, avec la bienveillance exigeante que Michel a toujours eu pour ses compagnons de scène ou de studio. Ainsi Fallot et Brachet swinguent avec l’efficacité souple et suave des mercenaires affectueux que furent Jackson et Gadd pour le compositeur de September Second ou Cantabile. Quant à Baptiste Herbin, il est ici peut-être plus magistral encore que dans les autres contextes où on l’a entendu exercer une virtuosité flamboyante qui nous laisse à chaque fois pantois. D’autres invités rejoignent parfois ce projet en forme de célébration, dont Philippe Petrucciani, frère guitariste impeccable à la fidélité inspirée.
Bernard Ivain, ancien agent de Michel Petrucciani
Line up :
Piano : Franck AVITABILE
Basse : José FALLOT
Batterie : Etienne BRACHET
Saxophone : Baptiste HERBIN